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Assassinat de Martinez Zogo au Cameroun : le procès ajourné quelques heures après son ouverture

Le procès très attendu de dix-sept accusés, à divers degrés, de l’assassinat au Cameroun du journaliste Martinez Zogo, pourfendeur de la corruption au sommet du pouvoir et supplicié par un commando militaire en 2023, s’est ouvert, lundi 25 mars, mais a été ajourné en fin de journée au 15 avril.
Un richissime homme d’affaires réputé proche de ministres et d’officiers, Jean-Pierre Amougou Belinga, le directeur d’alors du tout-puissant renseignement militaire, Léopold Maxime Eko Eko, son chef des opérations Justin Danwe ainsi que le commando de militaires accusé d’avoir enlevé, torturé et tué le journaliste en janvier 2023, sont jugés notamment pour séquestration, torture et assassinat, ou complicité de ces chefs, selon l’acte d’accusation lu devant le tribunal militaire de Yaoundé.
L’assassinat du journaliste populaire avait provoqué l’émoi et un véritable tollé au Cameroun, vaste pays d’Afrique centrale dirigé d’une main de fer depuis plus de quarante et un ans par le président Paul Biya, âgé de 91 ans.
Dans une salle comble, où une partie du public a dû rester debout, M. Amougou Belinga, le commissaire divisionnaire M. Eko Eko, alors chef de la direction générale de la recherche extérieure (DGRE), et le lieutenant-colonel Justin Danwe étaient présents comme les quatorze autres accusés, rapporte un journaliste de l’AFP présent dans la salle, mais ils n’ont pris la parole que pour répondre présents à l’énoncé de leur état civil et nommer leurs avocats.
La lecture de l’acte s’est bornée à énumérer tous les chefs d’accusation, sans détailler qui était soupçonné de les avoir commis ou d’en être le commanditaire ou complice.
Calmes, les accusés n’ont montré aucun signe d’émotion particulière pendant les trois heures d’audience. MM. Eko Eko et Amougou Belinga arboraient des costumes noirs, les militaires de la DGRE leur uniforme de l’armée.
Puis les avocats ont été invités à exposer leurs premières observations par le colonel Jacques Baudouin Misse Njoné, président du tribunal militaire, qui a ensuite renvoyé l’audience au 15 avril « pour répondre à toutes les observations et communiquer les listes des témoins ».
« Les parties civiles n’ont jamais été amenées à participer à l’instruction, c’est inadmissible ! A ce jour, je n’ai pas eu accès au dossier », s’est insurgé Calvin Job, l’avocat de la famille Zogo. Le commissaire du gouvernement du tribunal a promis de le lui remettre à l’issue de l’audience.
Enlevé le 17 janvier 2023 devant un poste de gendarmerie dans la banlieue de la capitale, Yaoundé, Arsène Salomon Mbani Zogo, dit « Martinez », 50 ans, avait été retrouvé mort cinq jours plus tard. Son corps nu était atrocement mutilé.
L’assassinat avait provoqué un immense choc au Cameroun, où M. Zogo était très populaire, mais aussi à l’étranger, contraignant le pouvoir à accepter de mettre sous les verrous des personnalités auparavant considérées comme intouchables.
Sur un ton corrosif, Martinez Zogo n’épargnait personne au sommet du pouvoir, sauf M. Biya et sa famille, une ligne rouge dans les médias.
Il dénonçait particulièrement, au micro de son émission « Embouteillage », sur la radio Amplitude FM, de présumées affaires de corruption avec pour cible favorite M. Amougou Belinga, propriétaire de nombreux groupes dans les domaines de la banque, des finances, de l’assurance, de l’immobilier et des médias, tous réputés en faveur du pouvoir.
L’assassinat de Martinez Zogo est largement interprété par l’opposition et les analystes comme un avatar sanglant de la guerre de succession que se livrent en sourdine deux clans rivaux dans l’entourage de Paul Biya.
Jean-Pierre Amougou Belinga est connu pour être très proche de ministres et protégés du président, dont certains réputés être des prétendants à la succession du patriarche, eux-mêmes rivaux du secrétaire général de la présidence, Ferdinand Ngoh Ngoh, également présenté comme un dauphin possible.
Le Monde avec AFP
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